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Portraits: Une violoniste aux Etats-Unis

Une rencontre avec Claire Haidara, violoniste installée aux Etats Unis depuis quatre ans, qui nous parle avec passion de son métier de violoniste et de pédagogue.

 Peux-tu nous parler de ta vocation, de ton parcours musical?

 « Je suis née à Clermont Ferrand, dans une famille mélomane. Mes parents chantaient dans une chorale et écoutaient beaucoup de musique classique. Mes deux frères aînés ont commencé la pratique d’un instrument (hautbois et flûte) en intégrant une école à horaires aménagées. Naturellement, j’ai suivi, avec comme choix, le violon, peut être pour me démarquer en choisissant une autre famille d’instruments. J’aime le contact du bois, matière vivante, et la façon dont on tient l’instrument, on l’enveloppe et fait corps avec lui! Mon petit frère suivra aussi le même parcours, en choisissant la trompette.

Ma maman ne travaillant pas, elle s’est investie dans notre vie musicale d’une manière souple et très efficace. Elle venait assister aux leçons avec grand intérêt et nous coachait sans aucune pression dans notre pratique au quotidien. Nous participions tous les ans à la fête de la musique qui , à cette époque, avait gardé toute son authenticité. Nous parcourions les rues de vieux centre ville de Clermont avec nos instruments et jouions devant les promeneurs ravis, et nous aussi !

Et ainsi après de longues études et plusieurs stages d’été, c’est vers l’âge de 14 ans que mon choix a été fait: je serais violoniste dans un orchestre. »

 Qu’est ce qu’a représenté pour toi la vie de musicienne d’orchestre?

 « Je l’ai vécue très tôt,  d’abord au sein du CNR de Clermont Ferrand, et ensuite dans l’Orchestre Français des Jeunes. Je n’avais que 14 ans, mais trois étés passés dans cet orchestre regroupant les meilleurs jeunes musiciens, m’ont littéralement faite basculer vers ce qui serait mon métier et ma passion plus tard. Emmanuel Krivine était le chef d’orchestre à cette époque, et vivre intensément la musique à ses côtés aura été le déclic.

Grâce à L’O.F.J, j’ai eu l’immense chance de partir en Inde pour une tournée de concerts( j’avais seize ans) où j’ai pu rencontrer Mère Theresa dans son dispensaire à Calcutta…Merveilleux souvenir! »

 Tu as été violoniste titulaire pendant plusieurs années, à l’orchestre de Cannes, que peux tu nous en dire en quelques mots?

« Appartenir à un groupe de musiciens, est une aventure humaine extraordinaire. Nous sommes issus de différentes cultures et pays, et nous partageons une même passion, la musique. Je peux dire que l’Orchestre de Cannes a été comme une famille pour moi.

 Un souvenir que tu voudrais nous partager?

« Je pense à notre concert à Paris salle Gaveau avec Mitslava Rostropovich, je venais d’intégrer l’orchestre régional de Cannes depuis peu de temps. Je réalisais mon rêve d’appartenir à un orchestre, d’en être un membre musicien, de contribuer à la sonorité de cet orchestre, comme la partie d’un tout,  car c’est la réunion de chaque musicien qui fabrique un son d’orchestre.  Et rencontrer un maître comme Rostropovitch est un moment unique dans la vie d’un musicien.

Les tournées à l’étranger sont aussi des moments intenses, humainement et musicalement. Nous avons eu la chance de partir deux fois en Chine, au Brésil et en Europe de l’Est. »

 Peux tu nous parler de ta nouvelle vie outre-Atlantique?

 « J’ai quitté la France il y a quatre ans pour vivre aux Etats unis avec ma famille. Ce qui signifie que j’ai démissionné de mon poste à l’Orchestre de Cannes. Choix mûrement réfléchi, car vivre une expatriation, c’est aussi une aventure extraordinaire. Bien sûr, nous sommes musiciens dans l’âme, et bien que de me produire sur scène et baigner au coeur de la musique me manque terriblement, le moment était donc venu pour moi de me réaliser comme musicienne, non plus dans la performance scénique mais dans la transmission. Je viens d’ouvrir mon studio de violon, ce projet a mûri progressivement après avoir enseigné à mon domicile. Me réaliser et exister officiellement en tant que professeur de violon dans un pays étranger est un challenge que je me suis lancé il y a quelques mois et je suis fière de ce projet qui est un un aboutissement personnel.

Mon principal but en tant que professeur de violon est que mes élèves aient du plaisir à venir à leur cours. les voir arriver avec le sourire et grimper les marches jusqu’à mon studio avec hâte est déjà une mission accomplie!

 Qu’est ce qui nourrit ta pédagogie? et qu’est ce qui te semble important en tant que professeur?

Je m’inspire de ma propre expérience qui est un moteur important, mais surtout je cherche à adapter ma pédagogie à chaque élève: tous sont différents, de personnalité tout d’abord, d’âge, et surtout, ils ont tous une démarche personnelle avec le violon: il faut apprendre à connaître chaque élève, cela prend du temps, pour ensuite cibler au mieux le travail et leur capacité à progresser et à apprivoiser leur instrument. Ce travail de connaissance à l’arrivée d’un nouvel élève, cette première phase est vraiment très enrichissante, elle est très variable en temps d’un élève à l’autre.

L’écoute de la musique est essentielle pour le développement de l’oreille, c’est pour  cela qu’à chaque début de cours, je propose une audition, les yeux fermés, d’une courte pièce de musique afin d’évacuer les tensions et se relaxer. J’encourage énormément mes élèves à écouter de la musique classique, encore plus maintenant en ces temps difficiles où la culture et la musique sont en grande souffrance. La disparition des spectacles vivants est une terrible réalité qui frappe le monde entier.

Note: découvrez le studio de violon de Claire aux Etats-Unis

photo © Yannick Perrin / ODC 

Un peu de technique...

(photo: Gwenaëlle Cochevelou: un élève du conservatoire du Centre-Mozart)

  « L’enjeu dans l’apprentissage du violon est de développer une excellente oreille car les notes n’existent pas d’elles-mêmes. Il faut placer les doigts à un endroit très précis pour que la note soit juste. Au début, il fait apprendre à tenir le violon et l’archet correctement. Cette position est tout à fait nouvelle et avant de pouvoir jouer les premiers sons, la posture à l’instrument est primordiale. Puis les premiers sons se feront sur les cordes à vide, en mettant l’archet en contact avec la corde, et en ouvrant le bras droit afin d’utiliser l’archet sur toute sa longueur. La technique d’archet prend du temps à acquérir car la pression de la main et la vitesse de l’archet sur la corde doivent trouver leur juste équilibre afin de ne pas écraser trop la corde et éviter le fameux « grincement ».
Enfin pour le violoniste, la justesse est la base de l’apprentissage, la note sera juste au prix d’un doigt bien placé, au millimètre près! »

Notre amitié remonte à plus de vingt ans déjà, lorsque Claire était étudiante au CNSM de Lyon et que j’y travaillais  au même moment à l’Opéra. Claire en plus d’être violoniste professionnelle, est une pianiste émérite, et je lui donne des conseils de piano en visio régulièrement.

1 commentaire pour “Portraits: Une violoniste aux Etats-Unis”

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